Imaginez-vous en train de courir un 100 mètres contre Usain Bolt. Il est déjà à 90 mètres, ses muscles fonctionnent à merveille, sa technique est impeccable. Vous, vous êtes aux alentours du 60e mètre, à bout de souffle, les lacets défaits, la poitrine serrée. Et que faites-vous ? Au lieu de serrer les dents et d'accélérer, vous vous arrêtez, vous appelez les juges et vous exigez que la ligne d'arrivée soit repoussée à 150 mètres, en prétendant que cela vous aidera à retrouver votre rythme.
Ça a l'air stupide ? Bien sûr. Si vous êtes lent, augmenter la distance ne vous avantage pas. Cela permet au plus rapide de creuser encore davantage l'écart. Et c'est précisément ce qui vient de se passer à Bruxelles. L'Europe ont cédé aux lobbies et a assoupli l'objectif de ventes de véhicules 100 % électriques d'ici 2035et l’a remplacé par un objectif « plus souple » de réduction des émissions de 90 %.
Pendant que l'Allemagne sabre le champagne car elle pourra produire des moteurs à pistons pendant encore quelques années, la Chine doit se tordre de rire. On vient de leur donner une décennie de plus pour enfin nous écraser.
Le diable se cache dans la « neutralité technologique ».
Les politiciens et les PDG des grands constructeurs automobiles nous présentent cela comme une simple question de « respiration » et de « réalisme ». Ils affirment que le marché n’est pas prêt, que le réseau électrique n’est pas prêt et que les clients ne veulent pas de véhicules électriques.
Soyons brutalement honnêtes : Les clients ne veulent pas de véhicules électriques chers et médiocres.
Quand on s'installe dans une voiture chinoise moderne qui coûte un tiers de moins que sa concurrente européenne mais qui propose des technologies de 2030, on comprend que le problème ne vient pas de la motorisation. Le problème, c'est l'arrogance du vieux continent. En décidant de réduction de 90 % et déploiement carburants synthétiques (e-carburants) et « l’acier vert », nous avons créé une faille bureaucratique par laquelle il sera possible de conduire Porsche 911C'est une excellente nouvelle pour les conducteurs du week-end et les collectionneurs (moi aussi, je l'admets), mais une stratégie désastreuse pour l'industrie de masse.
Pourquoi? Car tandis que les meilleurs ingénieurs de Wolfsburg et de Stuttgart s'efforcent d'optimiser au maximum le rendement du moteur à combustion interne (dont le rendement thermique est déplorable, à 40 %) et de l'alimenter avec un carburant électronique coûteux, en Chine, ils perfectionnent des batteries déjà chargées aujourd'hui avec 1000 kW.

Les mathématiques ne mentent pas : kW contre nostalgie
Examinons les chiffres, car contrairement aux services de relations publiques, ils ne connaissent pas les émotions. Les exportations de véhicules électriques de la Chine Le nombre de voitures a doublé l'an dernier. Malgré des droits de douane qui ne sont qu'un pansement sur une plaie ouverte, l'Europe regorge de modèles aux caractéristiques qui font pâlir la fierté européenne.
Prenons comme point de comparaison un modèle « phare » chinois moyen (tel que le Xiaomi SU7 ou le Zeekr 007) arrivant sur le marché aujourd'hui, et mettons-le à côté d'un modèle « premium » européen.
-
Puissance de charge : Les Chinois standardisent les systèmes de 800 volts avec des vitesses de charge plus de 400 kWCela signifie que vous « alimentez » les électrons presque aussi vite que vous faites le plein d'essence. Moyenne européenne ? On s'en vante encore. 150 kW ou 170 kW, tandis qu’à 200 kW, on parle déjà de recharge « ultra-rapide ».
-
Accélération: Famille chinoise VUS aujourd'hui jusqu'à 100 km/h (62 mph) accélérer dans moins de 3 secondesC'était autrefois le territoire de Ferrari.
-
Couple : Les moteurs électriques offrent une puissance instantanée 700 Nm (516 lb-pi) ou plus. Pas de temps de réponse du turbo, pas de boîte de vitesses, pas d'à-coups.
-
Prix: Le modèle chinois propose cela au prix d'une Golf GTI bien équipée.
Les nouvelles règles européennes permettent d'atteindre cet objectif. Réduction de 55 % des émissions D'ici 2030, il passera à l'année 2032Deux ans de « prolongation ». Dans le monde de la technologie – et la voiture en fait partie aujourd'hui. gadgets Sur roues, deux ans, c'est une éternité. C'est comme dire en 2008 qu'on allait encore utiliser des claviers sur les téléphones parce que « les écrans tactiles n'ont pas encore fait leurs preuves ».
Ce n'est pas une transition écologique, c'est une révolution technologique – et un suicide automobile en Europe
C’est là que réside notre plus grande erreur de raisonnement. Nous parlons sans cesse de « transition écologique », de sauver la planète. C’est noble, certes, mais dans un capitalisme brutal, cela n’a aucune importance si le produit n’est pas bon. La vérité, aussi dure soit-elle, est la suivante : La voiture électrique représente tout simplement une meilleure technologie. Il ne s'agit pas d'une transition écologique, mais d'une révolution technologique dans le domaine de la mobilité.
Il comporte moins de pièces mobiles (environ 20 contre 2 000 pour un moteur à combustion interne). Le couple est instantané. Son entretien est moins coûteux. Il est plus silencieux. Il est plus rapide. Même Gernot Döllner, PDG d’Audi, l’a admis en toute franchise : « La voiture électrique représente tout simplement une meilleure technologie. »
Et pourtant, ce secteur se comporte comme un enfant gâté. En assouplissant la réglementation, l'Europe envoie un mauvais signal : celui que l'innovation peut être retardée. le status quo On peut acheter en faisant du lobbying. C'est dangereux. La Chine n'attend pas. Les États-Unis investissent des milliards. Et l'Europe… rédige des réglementations complexes sur ce qui constitue de l'« acier vert » et espère un miracle. En réalité, c'est un suicide collectif européen.
Conclusion : Deviendrons-nous le Cuba de l'Europe ?
Au final, si je suis cynique, ce n'est pas sans raison. L'industrie automobile européenne a été le moteur de notre économie pendant un siècle. Or, nous assistons aujourd'hui à son déclin.
Cette concession de l'UE, ce report de l'échéance, n'est pas une solution miracle. Elle ne fait que prolonger l'agonie. Au lieu de nous contraindre à une innovation radicale, nous nous sommes accordé le répit nécessaire pour nous reposer sur nos lauriers. En 2035, nos routes seront envahies de voitures – à ceci près que sur le volant ne figurera plus le logo de notre enfance, mais un logo que nous ne saurons même plus prononcer ni lire aujourd'hui.
Mais chaque voiture a son charme. Peut-être que cette évolution permettra au moins de préserver le moteur V8 pour que nous, vieux dinosaures, puissions nous promener le dimanche. Pendant ce temps, à gauche, silencieusement et rapidement, nous serons dépassés par ceux qui ont compris que la ligne d'arrivée ne bouge pas, mais court toujours plus vite vers elle.





